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Une critique d'explication par les causes finales: l'anticontractualisme de Hume. Une histoire naturelle du politique

Published online by Cambridge University Press:  27 April 2009

Céline Bonicco
Affiliation:
Université Paris 1-Fondation Thiers

Abstract

This article proposes to show how David Hume's critique of contractualism is the political consequence of his analysis of causality. Hume rejects contractualism mainly for methodological reasons: explanations based on final causes are never satisfying. Therefore, contractualism applies to the political sphere the argument from design presented in the Dialogues concerning Natural Religion. The genesis of politics unfolded in A Treatise of Human Nature must be seen as a particular application of the only pertinent way of explaining phenomena, i.e., natural history, in which sympathy immanently configures and reconfigures society. The final cause must be replaced by the efficient cause. Hume's political theory—either positive or negative—and epistemology cannot be dissociated.

Type
Articles
Copyright
Copyright © Canadian Philosophical Association 2007

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References

Notes

1 Pour les citations tirées des œuvres de Hume, nous renvoyons à la pagination des différentes éditions anglaises et traductions françaises en mentionnant les initiales des éditeurs et traducteurs. Ici, cf. «Of the Original Contract», dans The Philosophical Works of David Hume, éd. Green, T. H. et Grose, T. H. (dorénavant GG), Londres, 1874–1875, reprint Darmstadt, Scientia Verlag Aalen, 1992, vol. 4, p. 460, n. 1Google Scholar; trad. de F. Grandjean (FG), dans Discours politiques, Mauvezin, Trans-Europ-Repress, 1993, p. 208, n. 422Google Scholar; voir aussi A Treatise of Human Nature, éd. Norton, David Fate et Norton, Mary J. (NN), Oxford, Oxford University Press, 2001, 3. 2. 7 et 3. 2. 8, p. 342352Google Scholar; dans la traduction de P. Saltel (PS), Paris, Flammarion, 1993, p. 143–162; enfin, Enquiries concerning the Principles of Morals, éd. Beauchamp, Tom L. (TB), Oxford, Clarendon Press, 1998, appendice 2, p. 91Google Scholar; dans la traduction de P. Baranger et P. Saltel (BS), Paris, Flammarion, 1991, p. 219. Hobbes développe l'hypothèse du contrat social dans le chapitre 17 du Leviathan et Locke dans le chapitre 7 du Deuxième Traité du Gouvernement civil.

2 Cf. Burke, E., Reflections on the Revolution in France, éd. O'Brien, , Harmonds-worth, Penguin Books, 1968, p. 149sq.Google Scholar

3 Cf. Binoche, B., Les trois sources des philosophies de l'histoire, Paris, Presses Universitaires de France, 1994, p. 87sq.Google Scholar

4 Une telle lecture est faite implicitement par B. Stroud, Hume, Londres, Henley et Boston, Routledge and Kegan Paul, 1977, p. 212, et explicitement par Gautier, D., «David Hume: Contractarian», The Philosophical Review, 1979, vol. 88, no 1, p. 338.CrossRefGoogle Scholar

5 Cf. Miller, D., Philosophy and Ideology in Hume's Political Thought, New York, Oxford University Press, 1981, p. 13Google Scholar, et Brownsey, P. F., «Hume and the Social Contract», Philosophical Quarterly, 1978, vol. 28, no 111, p. 132148.CrossRefGoogle Scholar

6 Le point le plus contestable de la présentation humienne réside dans la caractérisation de la morale lockienne comme système égoïste de la morale. Cf. Enquête sur les principes de la morale, appendice 2, TB p. 91; BS p. 219.Google Scholar

7 Cf. The Letters of David Hume, vol. 1, éd. Greig, J. Y. T., Oxford, Clarendon Press, 1932, p. 112.Google Scholar

8 Dialogues concerning Natural Religion, édition et introduction par S. Tweyman (ST), Londres et New York, Routledge, 1991, 226 p.Google Scholar; trad. de M. Malherbe (MM), Paris, Vrin, 1997, 254 p.

9 Sur l'importance de la notion de convention dans la philosophie humienne, cf. Livingston, Donald W., Hume's Philosophy of Common Life, Chicago, Chicago University Press, 1984, p. 4 et p. 6675.Google Scholar

10 «Of the Origin of Government», dans The Philosophical Works of David Hume, vol. 4, p. 113116Google Scholar; trad. de M. Malherbe (MM), dans Essais et Traités sur plusieurs sujets, tome 1, Paris, Vrin, 1999, p. 97100.Google Scholar

11 Sur ce point, cf. Thompson, M. P., «Hume's Critique of Locke and The Original Contract», Il pensiero politico, Anno X, no 2, 1977Google Scholar, Firenze, Léo S. Olschki, p. 199–201. Des penseurs comme Sidney dans les Discourses Concerning Governments ou Tyrrell dans sa Bibliotheca Politica insistaient sur l'évidence historique du contrat tout en se réclamant de Locke et de son analyse normative.

12 Il faut bien noter que, dans cet essai, Hume fait tour à tour appel au registre de la fondation et à celui de l'événement pour présenter l'hypothèse contractualiste.

13 Enquête sur les principes de la morale, appendice 2, TB p. 91, BS p. 219Google Scholar. Si cette critique peut sembler injuste eu égard à John Locke dont il semble difficile de faire un partisan de l'hypothèse égoïste (cf. supra note 6), il faut la lire comme la conséquence de la perspective épistémologique qui sous-tend l'argumentation de Hume.

14 The Collected Works of Thomas Hobbes, éd. Sir William Molesworth, Londres, Routledge, 1992, vol. 3, p. 153Google Scholar: «The final cause, end, or design of men, who naturally love liberty, and dominion over others, in the introduction of that restraint upon themselves, is the foresight of their own preservation, and of a more contented life thereby».

15 Terrel, J., Les théories du pacte social, Paris, Seuil, 2001, p. 249.Google Scholar

16 Enquiries concerning Human Understanding, 11, éd. Beauchamp, Tom L. (TB), Oxford, Clarendon Press, 2000, p. 100Google Scholarsq.; trad. de A. Leroy (AL), revue par M. Beyssade, Paris, Flammarion, 1983, p. 211 sq.

17 Par enthousiasme, Hume entend une des deux tendances de la religion populaire, caractérisée par une exaltation de la puissance imaginative et pouvant conduire au fanatisme et à la folie. Hume établit un lien entre l'enthousiasme et le parti Whig. Dans la mesure où les Whigs faisaient référence dans leur doctrine politique à une ancienne constitution fondée sur un contrat originel avant l'invasion de l'Angleterre par les Normands pour s'opposer à la dynastie des Stuart, l'on doit rapprocher le courant contractualiste du parti Whig. Cf. supra note 7.

18 «Of Superstition and Enthusiasm», dans The Philosophical Works of David Hume, vol. 3, p. 145Google Scholar; trad. de M. Malherbe (MM), dans Essais et Traités sur plusieurs sujets, tome 1, p. 133.Google Scholar

19 Cf. Haakonssen, K., «The Structure of Hume's Political Theory», Norton, dans D. F., dir., The Cambridge Companion to Hume, Cambridge, Cambridge University Press, 1993, p. 185.Google Scholar

20 «De la coalition des partis», dans The Philosophical Works of David Hume, vol. 4, p. 469Google Scholar; trad. de F. Grandjean, dans Discours politiques, p. 217.

21 Cf. «Du contrat originel», GG p. 446 et 449; FG p. 192 et 195.Google Scholar

22 Cf. notamment M. Malherbe dans son introduction aux Dialogues sur la religion naturelle, p. 51Google Scholar; Brahami, F., Le travail du scepticisme, Paris, Presses Universitaires de France, 2001, p. 171Google Scholar n. 2, et Groulez, M., Le scepticisme de Hume: les Dialogues sur la religion naturelle, Paris, Presses Universitaires de France, 2005, p. 82.Google Scholar

23 Cf. A Treatise of Human Nature, 1. 4. 1, NN p. 121, trad. de P. Baranger et P. Saltel (BS), Paris, Flammarion, 1995, p. 262.Google Scholar

24 Cf. ibid., 2. 3. 1, p. 260, trad. de J.-P. Cléro (JPC), Paris, Flammarion, 1991, p. 259 et Enquête sur l'entendement humain, 8, TB p. 69; AL p. 159–160.Google Scholar

25 Notons qu'après avoir examiné ce que la raison pouvait nous dire a priori de l'argument du dessein, Philon présente ce que nous en dit l'expérience. La conclusion est exactement la même: l'ordonnancement de nos pensées apparaît tout aussi délicat et minutieux que celui des végétaux et animaux.

26 Cf. Dialogues sur la religion naturelle, 5, ST p. 130; MM p. 130–131.Google Scholar

27 Il faut noter qu'une telle explication de l'organisation se tient également à l'écart du mécanisme dans la mesure où il y a une adaptation progressive par adaptation aux circonstances.

28 The Natural History of Religion, dans The Philosophical Works of David Hume, vol. 4, p. 309Google Scholar: «As every enquiry, which regards religion, is of the utmost importance, there are two questions in particular, which challenge our attention, to wit, that concerning its foundation in reason, and that concerning its origin in human nature», souligné par nous, trad. de M. Malherbe (MM), Paris, Vrin, 1971, p. 39.

29 Cf. Herdt, J., Religion and Faction in Hume's Moral Philosophy, Cambridge, Cambridge University Press, 1997, p. xii.Google Scholar

30 Cf. Livingston, D. W., Hume's Philosophy of Common Life, p. 60.Google Scholar

31 Annette Baier identifie, dans cette perspective, l'amour sexuel, la vie de la famille, et l'amitié comme des conventions primitives; cf. A Progress of Sentiments, Cambridge, Harvard University Press, 1991, p. 228.Google Scholar

32 Cf. Traité de la nature humaine, 3. 2. 2, NN p. 313Google Scholar; PS p. 88; et ibid., 3. 2. 3, NN p. 323; PS p. 105.

33 Cf. ibid., 2. 1. 11, NN p. 207; JPC p. 157; ibid., 3. 3. 1, NN p. 368; et PS p. 197.

34 Baier, A., A Progress of Sentiments, p. 231.Google Scholar

35 Cf. Traité de la nature humaine, 3. 2. 7, NN p. 345; PS p. 148.Google Scholar

36 Sur l'importance de l'habitude, cf. «De l'origine du gouvernement», GG p. 116Google Scholar; MM p. 99; et Traité de la nature humaine, 3. 2. 10, NN p. 362; PS p. 182.Google Scholar

37 Sur ce point et la typologie des différents niveaux de sympathie, cf. Herdt, , Religion and Faction in Hume's Moral Philosophy, chap. 1 et 2, p. 1781Google Scholar. L'auteur accorde une attention particulière au rôle de la sympathie élargie dans la théorie morale pour situer la perspective de Hume par rapport à celle de Hutcheson: Hume se réapproprie la pensée de ce dernier en faisant l'économie de sa dimension apologétique, c'est-à-dire du recours aux causes finales. L'analyse de Herdt déploie ainsi dans le domaine moral ce que nous nous proposons de montrer dans le domaine politique: la sympathie comme principe naturel est le substitut humien au principe de raison.

38 Cf. Durkheim, É., «La détermination du fait moral», dans Société et Philosophie, Paris, Presses Universitaires de France, 2002, p. 9294.Google Scholar