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La critique de la causalité chez Malebranche et chez Hume

Published online by Cambridge University Press:  05 May 2010

Jean Theau
Affiliation:
Université d'Ottawa

Extract

Puisqu'il faut nous limiter à un trés court espace, nous n'hésiterons pas à être synthétique et elliptique au point d'en être obscur, espérant que le lecteur rétablira quand il le faut la clarté analytique. Nous ne chercherons pas à élucider un point d'histoire, à savoir la part qu'il conviendrait d'accorder à l'influence de Malebranche dans les idées de Hume en matière de causalité, même s'il est vrai que toute la clarté désirable ou possible n'a pas été faite sur ce point. Hume a d'ailleurs expressément indiqué dans l'Inquiry (comme il l'avait laissé entendre dans le Treatise) qu'il tenait la critique malebranchiste de la causalité pour un acheminement vers la sienne, et il n'a pas hésité à lui emprunter un renfort d'arguments: ainsi en insistant sur l'impossibilité d'apercevoir un quelconque pouvoir causal soit dans les corps — pour expliquer les effets du choc par exemple, — soit dans l'âme — où notre volonté, malgré les illusions du contraire, ne se verrait mouvoir ni nos membres ni nos idées. Le seul tort de Malebranche aux yeux de Hume serait donc de ne pas être allé assez loin, puis d'être tombe dans l'inconsistance pour avoir conservé une attitude générale et un système incompatibles avec sa critique: car l'auteur de La Recherche de la Vérité, après avoir expulsé tout pouvoir causal du monde et de l'esprit, en rétablit en Dieu une infinité, et même s'appuie sur la causalité pour prouver l'existence du Tout-Puissant. Mais c'est ici que commence le probléme dont nous voulons traiter.

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Articles
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Copyright © Canadian Philosophical Association 1976

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References

1 Malgré des études comme celles de George Lyon L'Idéalisme anglais an XVIIIe siècle, de Pillon L'Evolution de l'Idéalisme au XVIIIe siècle, ou celle plus récente d'Alquié Le cartésianisme de Malebranche.

2 Cf. Inquiry section VII part I et Treatise section XIV.

3 Cf. Alquié op. cit. Conclusion.

4 Inquiry les derniéres pages de part I section VII.

5 Recherche de la Vérité Livre VI 2ème partie chap. III. De I'erreur la plus dangereuse de la philosophie des Anciens. cf. aussi Entretiens VII, 14.

6 Ibid.

7 EntreUens VII II

8 Avec le groupe de d'Holbach en particulier.

9 Inquiry VII I, où Hume semble reprendre à son compte les réflexions leibniziennes: «they rob nature and all created beings of every power…».

10 C'est ce qu'on a appelé l'ontologisme de Malebranche: cf. en particulier Entretiens Il et le célèbre Entretien… avec un philosophe chinois… Cet ontologisme a été vivement critiqué par Locke dans son Examination of P. Malebranche's Opinion of Seeing All Things in God, texte que François Duchesneau a analysé avec beaucoup de précision dans son Empirisme de Locke, Chap. VI. Locke et la théorie malebranchiste des idées p. 242–243.

11 Surtout le Berkeley critique de la physique — ou de la métaphysique mécaniste: cf. A New Theory of Vision, De Motu, The Analyst.

12 Entretien avec un philosophe chinois: «la vérité n'est que rapport» et Recherche de la Vérité Livre III 2e partie chap. 6, où Malebranche montre comment la vérité dépend des «idees» qui sont en Dieu.

13 cf. Recherche III 2e partie chap. 7 et Xe et XIIe Éclaircissements.

14 Car Hume. théoricien de la contingence absolue dans l'ordre ontologique. est aussi le théoricien du déterminisme absolu dans l'ordre phénomenal: cf. Inquiry Section VIII of Liberty and Necessity, et Section × of Miracles et Treatise III. 14: «there is but one kind of necessity, as there is but one kind of cause, and the common distinction betwixt moral and physical necessity is without any foundation in nature ».

15 cf. sur ce point XVeÉclaircissement.

16 Entretiens VII II

17 G.J. Warnock, dans Hume on Causation, cf. David Hume a Symposium, a trés bien mis en évidence cette différence capitale entre Locke et Hume sur ce point: pour Locke les rapports mécaniques sont en droit intelligibles.

18 Inquiry Section VII part I.

19 cf. à ce sujet l'excellent petit ouvrage de Paul Mouy. Les lois du choe des corps d'après Malebranche.

20 Treatise III Section VI

21 Ibid. Section VII.

22 Ibid. Section VIII.

23 Ibid. Section XII.

24 En particulier le fait que l'imagination, au lieu de la raison, soit prise comme critère métaphysique de la possibilité d'existence. Ce qui est imaginable peut être, tel semble le principe de Hume. La citation précédente est empruntée à Treatise III, 3.

25 En effet, sans mémoire, il n'y aurait pas conscience de répétition, et par conséquent pas de «conjonction constante», ce à quoi Hume réduit la connexion nécessaire: cf. les dernières pages de la section XIV de la partie III du Treatise.

26 «We pronounce it necessary, that everything whose existence has a beginning, should also have a cause» Treatise III, section II.

27 «We conclude that such particular causes must necessarily have such particular effects». Ibid.

28 Treatise III, 6: «I can only desire that this reasoning may be produced».

29 Contrairement à ce qu'affirment l'Inquiry, section IV, part 1: «the effect is totally different from the cause, and consequently can never be discovered in it» et le Treatise.

30 cf. Inquiry V, 1, et plusieurs autres passages semblables dans le Treatise.

31 cf. Inquiry V, 2, «we have no idea of this connexion, nor even any distinct notion what it is we desire to know when we endeavour at a conception of it».

32 Comme Kant l'a trés bien vu.

33 cf. Inquiry la phrase citée à la note 31.

34 Ce qui ne signific point du tout que ce doute n'ait pas de justification philosophique: mais l'ordre de la réflexion métaphysique ne doit pas être confondu, comme on l'a peut-être trop fait, avec l'ordre de l'acquisition du savoir.

35 Ce que nous avons essayé d'etablir en détail dans notre ouvrage La Conscience de la durée et le concept de temps, 1969. Privat ed.

36 «Modification de l'âme» pour Malebranche, «impression» pour Hume.

37 Note additionnelle sur le caractère analytique que nous avons attnbue (cf. les deux phrases qui suivent l'indication de la note 30) au principe fondamental de l'induction: «m≖mes causes, mêmes effets». Notre assertion pourrait recevoir l'expression symbolique suivante: pour tous x, si x=z et si y⊃z, alors X⊃Z. Sans doute Hume ne nous accorderait pas notre raisonnement. Pourquoi? Parce que, s'il admet la corrélation analytique (ou encore linguistique) des notions de cause et d'effet ou vice-versa, Hume nie qu'on puisse affirmer l'implication de l'effet par la cause sur le plan des «matters of fact» et par conséquent qu'on puisse jamais écrire en toute rigueur y⊃z. Notre assertion n'est done valable que si on admet (comme l'attitude commune n'hésite pas à le faire) qu'à la corrélation notionnelle entre la cause et l'effet correspond une corrélation physique entre telle cause et tel effet, autrement dit si on admet que la cause y implique l'effet z. enfin si on admet que l'identité entre x et y peut avoir un caractere objectif: autant d'assomptions que reçoit la raison commune. La suite de notre texte essaye d'indiquer pourquoi, précisément, Hume a été conduit pour sa part à rejeter ces assomptions avec la conclusion qui en découle.