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Corps et continuité. Remarques sur la “nouvelle” physique d'Averroès

Published online by Cambridge University Press:  12 August 2011

Cristina Cerami*
Affiliation:
Centre d'histoire des sciences et des philosophies arabes et médiévales, CNRS – Université Paris-Diderot, UMR 7219 5 rue Thomas Mann, Bâtiment Condorcet, Case 7093, 75205ParisCedex 13

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Dans l'horizon de l’étude de la philosophie naturelle d'Averroès, le nouveau travail de Ruth Glasner (RG) intitulé Averroes’ Physics: a Turning Point in Medieval Natural Philosophy occupera assurément une place de premier plan. Dans cet ouvrage, RG propose une étude analytique des trois commentaires d'Averroès à la Physique d'Aristote – l’Abrégé, le Commentaire Moyen et le Grand Commentaire. La force incontestable de son travail réside tout d'abord dans son approche double du texte d'Averroès, à la fois philologique et théorique. Tout au long de son analyse, ces deux aspects restent intimement liés et la mobilisation des instruments philologiques n'est jamais une fin en soi. Cette analyse a en effet pour but ultime de reconstruire le système du monde tel qu'Averroès le concevait. L'enjeu fondamental de cette étude est alors de supplanter la vision d'un Averroès interprète servile de la physique aristotélicienne et de présenter sa conception de la nature comme un système cohérent, organique et original.

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Copyright © Cambridge University Press 2011

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References

1 Ğ. al-ʿAlawī a été en effet le premier exégète à tenter une reconstruction de la pensée d'Averroès visant à la comprendre dans son évolution (Cf. al-ʿAlawī, Ğ., al-Matn al-rušdī (Casablanca, 1986)Google Scholar.

2 Puig, J., “Les stades de la philosophie naturelle d'Averroès”, Arabic Sciences and Philosophy, 7 (1997): 115–37Google Scholar.

3 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 32.

4 Cf. Wolfson, H.A., “Revised plan for the publication of a Corpus commentario rum Averrois in Aristotelem”, Speculum, 38 (1963): 88104CrossRefGoogle Scholar. La traduction attribuée à Théodore est imprimée dans l’édition des Juntes de 1562 à côté de la traduction hébraico-latine réalisée par Jacob Mantino au XVIe siècle.

5 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 32.

6 Sur la figure historique de Théodore d'Antioche et sur le rôle qu'il a joué à la cour de Frédéric II, Burnett, voir C., “Master Theodore, Frederick II's philosopher”, dans Federico II e le nuove culture. Atti del XXXI Convegno storico internazionale (Todi, 9-12 ottobre 1994), (Spoleto, 1995), pp. 225–85Google Scholar; Varvaro, A., “Federico II e la cultura del suo tempo”, Studi Storici, 37 (1996): 391404Google Scholar; Kohlberg, B. Z. Kedar-E., “The intercultural career of Theodore of Antioch”, Arbel, dans B. (éd.), Intercultural Contacts in the Medieval Mediterranean (London / Portland, 1996), pp. 164–76Google Scholar.

7 Averroès, GC Phys., (antiqua translatio) 1B7–11: “On ne connaît pas non plus de commentaire littéral d'Alexandre si ce n'est pour une partie du premier <livre>, pour le deuxième, le quatrième, le cinquième, le sixième, le septième; et ce qu'on a sur une partie du huitième n'est pas d'Alexandre” (je traduis); (Mantini translatio) 1E7–11: “Ce que jusque-là on a vu du commentaire d'Alexandre est une partie du premier, le deuxième, le quatrième, le cinquième, le sixième, le septième; de fait, une certaine partie du huitième livre [corr. sextum in octavum] ne sont pas les paroles d'Alexandre”; hébreu 1a2–5: “As for what has reached us of the commentary of Alexander on this book, part of the first [treatise], the second, the fourth, the fifth, the sixth, the seventh, and part of the eight are not the words of Alexander” (trad. Harvey, S., “The Hebrew translation of Averroes’ Prooemium to his Long Commentary on Aristotle's Physics”, Proceedings of the American Academy for Jewish Research, 52 [1983]: 5584CrossRefGoogle Scholar).

8 La traduction de S. Harvey me semble peu plausible, car en ne distinguant pas entre une partie du commentaire qu'Averroès attribuerait à Alexandre et une partie qu'il ne lui attribuerait pas, elle semble suggérer que la totalité soit des livres soit des parties énumérées était considérée par Averroès comme n’étant pas d'Alexandre. En outre, dans le cas où Averroès parlerait des parties et non des livres dans leur ensemble, on ne comprend pas pourquoi il répéterait à nouveau, à la fin de la liste, que la partie du huitième livre n'est pas, elle non plus, d'Alexandre.

9 En reprenant la traduction de S. Harvey, elle suggère alors de lire le début du prologue avec une ponctuation différente: “As for what has reached us of the commentary of Alexander on this book, part of the first [treatise], the second, the fourth, the fifth, the sixth; [what we have of] the seventh, and part of the eight are not the words of Alexander”.

10 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 54.

11 Ce passage correspond aux lignes 248 b27–28 de la version B, dont Averroès lisait et commentait la traduction.

12 CG Phys. VII 3, c. 20, 323 I10–13: “Sed quaeritur hic, quare tacuit hic speciem qualitatis quae dicitur potentia et impotentia naturalis”.

13 CG Phys. V 3, c. 20, 323 I13–K9: “Et Alexander dicit quod iam declaratum est universaliter quod <hoc> non est qualitas. Et intendit, ut mihi videtur, quod res agunt per suas formas et patiuntur per suas materias; et formae et materiae sunt substantiae necessario. Et forte intendit quod declaratum est universaliter quod non est qualitas alterabilis, quoniam est forma: et declaratum est quod formae non sunt alteratio, sed sequuntur alterationem”.

14 Ibn al-Nadīm, Kitāb al-Fihrist, mit Anmerkungen herausgegeben von Gustav Flügel (Leipzig, I871), I, p. 248.

15 Cf. Peters, F.E., Aristoteles Arabus (Leiden, 1968), pp. 712Google Scholar; Dictionnaire des philosophes antiques, publié sous la direction de R. Goulet, t. I (Paris, 1989), pp. 129–30Google Scholar.

16 Simplicius, In Phys. VII 3, 1080, 26 et ss. Les lignes du lemme de Simplicius correspondent aux lignes 248 b27–28 de la version B.

17 Je remercie Marwan Rashed de m'avoir permis d'examiner, avant leur parution, les fragments du commentaire perdu d'Alexandre dont il va publier l’édition, cf. Rashed, M., Alexandre d'Aphrodise. Commentaire perdu à la Physique d'Aristote (livres IV-VIII): les scholies byzantines (Berlin / New York, 2011)CrossRefGoogle Scholar.

18 Cf. Sambursky, S., Physics of the Stoics (London, 1959), p. 53Google Scholar.

19 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 73.

20 La précision est nécessaire. En effet, si l'on garde la formulation que RG propose de la “lecture faible” de l'argument de Phys. VIII (cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 70), Aristote ici ne ferait que répéter ce qu'il a affirmé en Phys. III 1, c'est-à-dire que le mouvement existe toujours dans une chose mue. Ce qui ne permet, en aucun sens, de conclure que tout mouvement est précédé par un autre mouvement.

21 Maier, A., “Forma fluens oder Fluxus formae?”, dans ead., Zwischen Philosophie und Mechanik (Roma, 1958), p. 81215Google Scholar; Murdoch, J. E. et Sylla, E. D., “The science of motion”, dans Lindberg, D.C. (éd.), Science in the Middle Ages (Chigaco, 1978), pp. 206–64Google Scholar; Trifogli, C., Oxford Physics in the Thirteenth Century (Leiden / Boston / Köln, 2000)Google Scholar; Hasnawi, A., “Alexandre d'Aphrodise vs Jean Philopon. Notes sur quelques traités d'Alexandre ‘perdus’ en grec, conservés en arabe”, Arabic Sciences and Philosophy, 4.1 (1994): 53109, p. 67CrossRefGoogle Scholar; id., Le mouvement et les catégories selon Avicenne et Averroès: L'arrière-fond grec et les prolongements latins médiévaux”, Oriens-Occidens, 2 (1998): 119–22Google Scholar; id., “Le statut catégorial du mouvement chez Avicenne: contexte grec et postérité médiévale latine”, dans Morelon, R. et Hasnawi, A. (éd.) De Zénon d’Élée à Poincaré: recueil d’études en hommage à Roshdi Rashed (Paris, 2004), pp. 561605Google Scholar.

22 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 119.

23 Averroès, GC Phys. VI 4, c. 32, C6–D16.

24 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, pp. 122 et ss.

25 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, pp. 127 et ss.

26 T. Holden, The Architecture of Matter: Galileo to Kant (Oxford, 2004), p. 18.

27 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, p. 145.

28 Averroès (Abū l-Walīd Ibn Rušd), Mittlerer Kommentar zu Aristoteles’, De Generatione et Corruptione, mit einer einleitenden Studie versehen, herausgegeben und Kommentiert von Heidrun Eichner (Paderbon / München / Wien / Zürich, 2005), (dorénavant Averroès, CM DGC), c. 38, pp. 47,16–48,6.

29 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, pp. 159–63.

30 Cf. C. Cerami, “Mélange, minima naturalia et croissance animale dans le Commentaire Moyen d'Averroès à De Generatione et Corruptione I 5”, dans J. Biard (éd.), La nature et le vide. Le vide dans la physique du Moyen Âge. Volume en honneur d'E. Grant, Brepols, à paraître.

31 Cf. Glasner, Averroes’ Physics, n. 76 p. 153; n. 118, p. 161.

32 N'ayant pas accès au texte hébraïque, je ferai référence à la traduction hébraico-latine réalisée à la Renaissance par Jacob Mantino et publiée dans l’édition des Juntes en 1562 aux f. 455 et ss., c. 58–62.

33 Dans la note 76 de la p. 153, Glasner propose une traduction de ce passage, mais elle saute les lignes dans lesquelles Averroès pose sa propre question. La structure du raisonnement d'Averroès s'en trouve assez modifiée.

34 Averroès, GC Phys., III 7, c. 60, 114 D3–E4: “Consideratio enim Naturalis de mensura est secundum quod est finis et existens in materia, consideratio vero Geometrae secundum quod est abstracta a materia. Et cum mensura consideratur his duobus modis, invenitur secundum dispositiones oppositas et convenientes. Convenientia enim est in hoc quoniam semper diminuitur, sive consideretur secundum quod est in materia, sive secundum quod est in imaginatione. Propositio igitur Geometrae est quoniam possibile est imaginari ad omnem lineam lineam minorem illa, et propositio Naturalis conveniens isti est quod linea potest diminui in infinito”.

* Je tiens à remercier vivement Marwan Rashed qui, avec ses conseils et ses critiques, m'a permis d'améliorer la forme et le contenu d'une première version de ce texte. Je voudrais également remercier V. Cordonier pour ses remarques et ses suggestions. Je suis évidemment seule responsable pour les fautes et les imprécisions qui demeurent.